Nous avons pris l’habitude à travers nos différents articles de vous inciter à protéger, dans les meilleurs délais, vos actifs en propriété intellectuelle au risque de vous exposer à des actes de contrefaçon.
Et pourtant, l’intérêt de la protection réside aussi dans la protection contre la concurrence déloyale qui fait d’ailleurs l’objet d’un traitement particulier dans le cadre de l’Annexe VIII du code OAPI de la propriété intellectuelle.
Certains Spécialistes et Experts vont même jusqu’à parler d’une autre branche spécifique de la propriété intellectuelle à côté de la propriété littéraire et artistique (droit d’auteur) et de la propriété industrielle.
Si cela peut paraître étonnant pour un certain public, il n’y a rien d’étrange à cela. On s’en explique.
Qu’est-ce que la concurrence ? -.
La concurrence est définie dans le langage économique comme la compétition qui se joue, sur un même marché entre plusieurs individus dans l’intention d’atteindre plus complètement une fin économique, en particulier l’offre de produits ou de services qui satisfont des besoins égaux ou proches.
Quel rôle joue la propriété intellectuelle en matière de concurrence ? -.
En ce sens, les droits de propriété intellectuelle jouent un rôle essentiel lorsqu’il s’agit notamment de distinguer ses produits ou services (marques, packaging…), de faire valoir une origine commerciale ou une localité (indication géographique) ou encore de se procurer un avantage technologique (brevet, certificat d’obtention végétale…).
Ils constituent ainsi de véritables instruments de concurrence, ce qui n’est pas sans risque pour l’économie du marché tout entier.
Gare ici aux ententes anticoncurrentielles, abus de position dominante ou de monopole d’exploitation, et autres opérations de concentration économique impliquant un droit de propriété intellectuelle[1] !
Mais là n’est pas vraiment le sujet du présent article.
Qu’est-ce qu’un acte de concurrence déloyale ? -.
Il est un acte ou une pratique qui, dans l’exercice d’activités industrielles ou commerciales :
- Est généralement contraire aux usages honnêtes du marché ;
- Crée ou est de nature à créer une confusion avec l’entreprise d’autrui ou ses activités, en particulier avec les produits ou services offerts par cette entreprise ;
- Porte atteinte ou est de nature à porter atteinte à l’image ou à la réputation de l’entreprise d’autrui, que cet acte ou cette pratique crée ou non une confusion ;
- Induit ou est de nature à induire le public en erreur au sujet d’une entreprise ou de ses activités, en particulier des produits ou services offerts par cette entreprise ;
- Discrédite ou est de nature à discréditer l’entreprise d’autrui ou ses activités, en particulier des produits ou services offerts par cette entreprise.
Autrement dit, l’acte de concurrence déloyale a trait à la confusion, à l’atteinte à l’image ou à la réputation d’autrui, à la tromperie à l’égard du public ou au dénigrement.
En quoi peut-il résulter de la propriété intellectuelle ? -.
Eh bien, ces différents actes peuvent porter sur une marque, un nom commercial, l’apparence spéciale d’un produit (packaging) ou sur tout autre signe distinctif d’une entreprise.
Plus encore, chacun d’eux peut résulter de la mauvaise publicité ou promotion :
- Du procédé de fabrication d’un produit (pourquoi pas une invention) ;
- De la qualité, quantité, origine ou autre caractéristique d’un produit ou d’un service ;
- Des conditions auxquelles un produit ou un service est offert.
Quelques exemples concrets -.
Ont par exemple été considérés comme actes de concurrence déloyale :
- Le fait d’apposer, à proximité du magasin d’un concurrent, des panneaux guidant le public vers un autre magasin ;
- Le fait de se faire passer, auprès des clients d’un concurrent, pour un partenaire de ce concurrent (alors que tel n’est pas le cas) ;
- Le fait de donner l’impression, auprès des clients d’un concurrent, que l’on travaille pour ce concurrent ou que l’on offre des services au nom et pour le compte de ce concurrent (alors que tel n’est pas le cas) ;
- Le fait d’entretenir la confusion avec l’emballage utilisé par un concurrent, afin de faire croire au consommateur que le nouveau produit (dont l’emballage est l’objet de la confusion) remplace le produit concurrent et/ou émane du concurrent ;
- Le fait de propager ou de distiller des rumeurs au sujet d’une autre entreprise afin de la discréditer auprès de ses clients (par exemple : lancer des rumeurs relatives à des prétendues irrégularités urbanistiques par un promoteur immobilier).
On peut imaginer quantité d’autres exemples.
Faut-il distinguer l’acte de concurrence déloyale d’un acte de contrefaçon ? -.
En théorie, l’action en contrefaçon sanctionne la violation à proprement parler d’un droit de propriété intellectuelle, tandis que l’action en concurrence déloyale est essentiellement la sanction de l’usage de moyens déloyaux dans la concurrence qui peut, le cas échéant, impliquée un droit de propriété intellectuelle.
L’article 1er alinéa 2 de l’Annexe VIII du code OAPI de la propriété intellectuelle consacré à la protection contre la concurrence déloyale dispose qu’elle s’applique « indépendamment et en sus de toute disposition législative protégeant les inventions, les dessins et modèles industriels, les marques, les œuvres littéraires et artistiques et autres objets de propriété intellectuelle ».
En d’autres termes, l’action en concurrence déloyale se présente, à défaut ou à côté de l’action en contrefaçon, comme une protection complémentaire.
En savoir plus nous, nos domaines et nos expertises.
Team EKEME LYSAGHT
[1] Il arrive, en effet, que les droits de propriété intellectuelle (DPI) puissent être un frein à l’économie de marché en cas notamment d’ententes anticoncurrentielles dans le cadre par exemple d’octroi de licence, d’abus de position dominante dans le cadre de pratiques discriminatoires en présence d’un DPI essentiel pour pénétrer ou renforcer sa présence sur un marché, et même d’opérations de concentration économique dans le cadre de fusion-acquisition impliquant le transfert d’un DPI qui conforterait le contrôle exercé par une entreprise sur une autre