
Et si on continuait de s’intéresser aux rapports entre propriété intellectuelle et sport …
Lors de notre dernier article sur le sujet, on s’était penchés sur la manière dont le droit d’auteur s’applique aux manifestations sportives telles qu’un combat de boxe, un match de football, de rugby ou encore de basket.
Nous nous étions quittés sur la question de la place qu’occupe les marques, en tant que droits de propriété intellectuelle, et plus particulièrement en tant que droits de propriété industrielle (n’oubliez jamais le distinguo à faire et qui est expliqué ici), dans le sport.
Alors, que dire de ces marques ? Pour en parler, on évoquera aujourd’hui le cas du footballeur Lionel Messi et de sa marque éponyme.
En effet, il a, il y a quelques années, voulu faire enregistrer la marque européenne « MESSI + Logo » pour des produits de vêtements, de chaussures et d’autres articles de prêt-à-porter.
Contrairement à quelques sportifs qui ont pu se montrer un peu plus négligeant, et on pense notamment à Roger Federer qui avait laissé son équipementier déposer la marque « RF Logo » – qu’il n’aura jamais pu récupérer ensuite -, c’est bel et bien le nom entier du joueur, Lionel Andres Messi Cuccitini, qui figure comme titulaire de la marque dans les registres européens.
Bon réflexe, mais avait-il eu celui de déposer cette marque à temps ?
Et oui, comme on vous l’expliquait dans cette publication sur la nécessaire étape d’une recherche avant de déposer un signe comme marque, le premier à le faire se constitue dessus « un droit antérieur », sur la base duquel il peut agir en contestation (on parle souvent « d’opposition » ou de « revendication ») en vue de l’annulation et/ou de la radiation d’un autre signe similaire ou identique qui serait déposé postérieurement.
Hélas, c’est ce qui est arrivé à Lionel Messi !
En l’espèce, un fabricant de vélos espagnol, titulaire de la marque européenne antérieure « MASSI » (enregistrée notamment pour des produits de vêtements, chaussures, casques, tenues de protection et gants), a lancé une procédure d’opposition contre la marque du footballeur.
Le fabricant estimait à l’appui de son opposition, qu’entre « MESSI » et « MASSI », il existait un risque de confusion ; les signes étant très similaires et les produits visés par ces signes également.
N.B. : On aura l’occasion de revenir sur la notion de « risque de confusion » dans nos prochaines publications.
Si l’opposition a, dans un premier temps, prospéré, ce n’était plus le cas lorsque l’affaire était dévolue au Tribunal de l’Union européenne qui a, pour sa part, estimé dans son arrêt que la marque « MESSI » n’était pas susceptible de créer une confusion avec la marque « MASSI » au motif principal : qu’en entendant « MESSI », une partie significative du public fera le lien avec le célèbre footballeur, ce qui n’est le cas de « MASSI ».
Le Tribunal estimait ainsi que cette différence conceptuelle était suffisante pour neutraliser les similitudes, évidentes, qui existaient entre les signes sur les plans phonétique et visuel.
Prolongation oblige, l’affaire était renvoyée devant la Cour de justice de l’Union européenne qui, le 17 septembre dernier, tranchait définitivement le litige en rejetant le pourvoi formé par le fabricant et en considérant notamment que dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il doit être tenu compte de l’éventuelle notoriété de la personne qui demande que son nom soit enregistré en tant que marque, dès lors que cette notoriété peut avoir une influence sur la perception de la marque par le public pertinent.
C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a considéré que la notoriété du footballeur constituait un facteur pertinent afin d’établir une différence conceptuelle entre les termes « Messi » et « Massi ».
En définitive, c’est, disons-le clairement, la réputation du joueur qui a joué dans cette affaire !
Mais, dans la mesure où nous ne jouissons pas tous d’une notoriété égale à celle de Messi, il est bon que chacun d’entre nous pense à enregistrer à temps ses signes comme marque …
Team Ekeme Lysaght
Comments (4)
NKO Vanessa
says novembre 03, 2020 at 16 h 03 minJe suis bien d’accord avec vous ma Chère. Pareil pour tout autre produit d’ailleurs, sinon le risque est que celui qui viendra après vous notoriété ou pas… et enregistre son produit pourra vous portez devant la justice pour plagiat alors que vous étiez le premier avec l’idée.
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says janvier 22, 2021 at 9 h 56 min[…] spécialement dédiés de la part de nos équipes (notamment ici pour les liens généraux et là pour l’affaire du footballeur MESSI), ce fait d’actualité appelle par contre à une […]
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says novembre 18, 2021 at 10 h 37 min[…] ou du contentieux relatif à la validité d’une marque au profit d’une autre (notamment en cas d’opposition formée par un tiers), l’appréciation du risque de confusion doit être faite avec […]