
On trouve des ressources génétiques dans les plantes médicinales, les plantes cultivées et les races animales.
Certaines de ces ressources génétiques ont un lien avec des pratiques traditionnelles en raison de leur utilisation et de leur conservation par les peuples autochtones et les communautés locales, souvent de génération en génération.
Officiellement, les ressources génétiques sont définies dans la Convention sur la diversité biologique comme du matériel d’origine végétale, animale, microbienne ou autre, ayant une valeur effective ou potentielle.
Les ressources génétiques en elles-mêmes, telles qu’on les trouve dans la nature, ne peuvent pas être directement protégées en tant qu’actifs de propriété intellectuelle du fait qu’elles ne sont pas des créations de l’esprit humain.
Toutefois, les inventions fondées sur des ressources génétiques (et des savoirs traditionnels associés) ou mises au point sur la base de celles-ci peuvent quant à elles bénéficier d’une protection dans le cadre du système des brevets.
C’est ici que s’est notamment posée l’une des questions majeures de propriété intellectuelle liées aux ressources génétiques qui est celle de la prévention de la délivrance de brevets indus pour des inventions qui ont été créées sur la base de ressources génétiques et de savoirs traditionnels associés, mais qui ne remplissent pas les critères de brevetabilité tels que la nouveauté et l’activité inventive.
Une question ardue qui a demandé la participation de près de 193 pays à travers le monde et qui a nécessité 2 décennies de négociations pour (enfin) aboutir, le 24 mai 2024 en Suisse, à l’adoption par la Conférence diplomatique de l’Organisation Mondiale de Propriété Intellectuelle (OMPI), d’un instrument international spécialement dédié à la propriété intellectuelle relative aux ressources génétiques et aux savoirs traditionnels associés aux ressources génétiques.
Que faut-il retenir de cet Accord ?
1/ Les objectifs
L’instrument vise à :
- Favoriser l’efficacité, la transparence et la qualité du système des brevets d’invention en ce qui concerne l’utilisation des ressources génétiques et les savoirs traditionnels associés ; et
- Prévenir la délivrance de brevets indus pour des inventions qui ne sont pas nouvelles ou qui n’impliquent pas d’activité inventive eu égard ces ressources.
2/ L’exigence de divulgation dans les demandes de brevet
La divulgation exhaustive des inventions est l’un des principes fondamentaux du droit des brevets. Les inventeurs doivent expliquer leur invention de manière suffisamment détaillée pour qu’une personne, un homme du métier, ayant le même niveau de connaissances, puisse reproduire l’invention.
En outre, l’état de la technique doit généralement être divulgué pour permettre aux examinateurs de brevets de déterminer si l’invention est véritablement nouvelle et non évidente.
Le texte prévu par l’instrument établit une exigence de divulgation dans les demandes de brevet en vertu de laquelle les déposants de demandes de brevet seraient tenus de divulguer le pays d’origine des ressources génétiques et/ou le peuple autochtone ou la communauté locale qui a fourni les savoirs traditionnels associés à ces ressources lorsque les inventions revendiquées sont « sensiblement ou directement » fondées sur des ressources génétiques.
Si cette information n’est pas connue, la source des ressources génétiques ou des savoirs traditionnels associés à des ressources génétiques devrait être divulguée. Si aucune des informations précitées n’est connue du déposant de la demande de brevet, ce dernier devrait être tenu de l’indiquer.
N.B. : Quelque 35 organisations régionales et pays prévoyaient déjà une exigence en ce sens dans leur législation.
Les offices des brevets fourniraient certaines précisions sur la façon de satisfaire à l’exigence de divulgation et offriraient la possibilité de remédier à toute non-communication des informations minimales ou de corriger toute divulgation erronée ou incorrecte. Toutefois, ils ne seraient pas obligés de vérifier l’authenticité de la divulgation.
3/ Les sanctions et les mesures correctives
Le non-respect de ces exigences de divulgation serait soumis à des mesures appropriées, efficaces et proportionnées, conformément à la législation nationale, bien que les déposants de demandes de brevet aient la possibilité de rectifier la non-communication des informations requises.
Le brevet pourrait, lui-aussi, être révoqué ou rendu inopposable uniquement en cas d’intention frauduleuse. Sortie de ce cas, aucune partie contractante ne devrait révoquer ou rendre inopposable un brevet au seul motif que le déposant n’a pas communiqué les informations requises.
4/ Les systèmes d’information
Le texte prévoit l’établissement à titre volontaire de systèmes d’information, tels que des bases de données sur les ressources génétiques et les savoirs traditionnels associés, en consultation avec les peuples autochtones et les communautés locales, selon le besoin.
Les bases de données sur les ressources génétiques rassemblent et répertorient un large éventail de renseignements et de documents, notamment des informations sur les ressources génétiques, les savoirs traditionnels qui leur sont associés, les utilisations connues des ressources génétiques et les recueils scientifiques correspondants.
Ces systèmes devraient être accessibles aux offices de propriété intellectuelle aux fins de la recherche et de l’examen, et les sauvegardes appropriées devraient être élaborées en consultation avec les peuples autochtones et les communautés locales, le cas échéant.
5/ Le mécanisme d’examen
Le texte prévoit un mécanisme d’examen interne de l’instrument afin de permettre l’examen de certaines questions au plus tard dans les 4 ans après son entrée en vigueur.
Ces questions comprennent l’éventuel élargissement de l’exigence de divulgation à d’autres domaines relevant de la propriété intellectuelle et aux dérivés, ainsi que d’autres questions découlant de technologies nouvelles et émergentes pertinentes à l’égard de l’application de l’instrument.
6/ La non-rétroactivité
Bien qu’il existe déjà plusieurs régimes de divulgation obligatoire sur les plans national et régional, la proposition de base comprend une clause de non-rétroactivité selon laquelle aucune obligation de cet instrument ne devrait être imposée aux demandes de brevet déposées avant la ratification de cet instrument ou l’adhésion à celui-ci.
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Team EKEME LYSAGHT